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Si une convention d'assistance passée entre une société commerciale et une autre fait double emploi avec les missions dévolues à un dirigeant social, cette convention est nulle. La Cour d'appel de Paris l'a rappelé récemment (CA Paris, 4 juillet 2013, RG n°11/06318) mais cette décision n'est que la stricte application d'une jurisprudence déjà bien établie de la Cour de cassation.

Ainsi, la Chambre commerciale de la Cour de cassation s'est prononcée par un arrêt du 14 septembre 2010 (Cass. com. 14 septembre 2010, n°09-16084). M. X exerçait les fonctions de directeur général de la société SOREPLA INDUSTRIE, société anonyme à conseil d'administration. Le 20 mars 2001, la société SAMO GESTION, constituée au mois de janvier par M. X, a conclu avec la société SOREPLA INDUSTRIE une convention de prestations de services par laquelle elle s'engageait à fournir à la société SOREPLA INDUSTRIE différentes prestations et mettait à sa disposition M. X moyennant une rémunération comportant une partie fixe et une partie proportionnelle au résultat net de la société SOREPLA INDUSTRIE. Celle-ci ayant cessé d'exécuter la convention, la société SAMO GESTION l'a poursuivie en paiement. La société SOREPLA INDUSTRIE a sollicité l'annulation de la convention et la restitution des sommes versées en exécution de celle-ci. Un arrêt de la Cour d'appel de Paris du 13 mars 2009, rectifié le 12 juin 2009, a annulé la convention.

Par son arrêt du 14 septembre 2010, la Cour de cassation rejette le pourvoi de la société SAMO GESTION : la convention d'assistance définissait son objet en des termes dont il résultait qu'elle faisait double emploi avec l'exercice par M. X. de ses fonctions de directeur général et cela revenait à rémunérer la société SAMO GESTION pour des prestations qui étaient accomplies par M. X. au titre de ses fonctions sociales ; ladite convention était donc dépourvue de cause et, conformément aux dispositions de l'article 1131 du Code Civil, devait être annulée.

La Cour de cassation a fait application de la même jurisprudence dans une affaire ayant donné lieu à un arrêt du 23 octobre 2012 (Cass. com. 23 octobre 2012, n°11-23376). En 1975, M. Y est nommé directeur général et Président du conseil d'administration de la société MECASONIC. En 2005, la société MECASONIC conclut avec la société PGCD, dont le gérant et associé unique est M. Y, une convention de prestations de services. En 2007, M. Y. est démis de ses fonctions de directeur général de la société MECASONIC et le contrat conclu avec la société PGCD est résilié. La société PGCD et M. Y. assignent la société MECASONIC en paiement de l'indemnité contractuelle de résiliation du contrat. La Cour d'appel de Chambéry, par un arrêt du 21 juin 2011, rejette la demande, considérant que la convention de prestations de services est nulle. La société PGCD forme un pourvoi en cassation.

La Cour de cassation, par son arrêt du 23 octobre 2012, rejette le pourvoi. Elle relève que, selon la convention litigieuse, la société MECASONIC avait confié à la société PGCD les prestations de création et de développement de filiales à l'étranger, d'organisation et/ou de participation à des salons professionnels, de définition des stratégies de vente dans les différents pays visés et de recherche de nouveaux clients à l'étranger. Une telle convention constitue une délégation à la société unipersonnelle PGCD, dont M. Y. était le gérant, d'une partie des fonctions de décision, de stratégie et de représentation incombant normalement à ce dernier en sa qualité de directeur général de la société MECASONIC et fait donc double emploi, à titre onéreux pour cette société, avec lesdites fonctions sociales. Les obligations stipulées à la charge de la société MECASONIC sont dépourvues de contreparties réelles et la convention litigieuse, sans cause, doit être annulée.

Dans l'affaire ayant donné lieu à l'arrêt de la Cour d'appel de Paris en date du 4 juillet 2013, M. Z., directeur général d'une SAS, fait conclure par celle-ci une convention d'assistance, de management et de gestion avec une entreprise individuelle de conseil qu'il dirige. Postérieurement, son mandat de directeur général est révoqué et la convention d'assistance, de management et de gestion est résiliée. Monsieur Z., au nom de l'entreprise individuelle de conseil, assigne en réparation du préjudice causé. Le tribunal de commerce lui donne satisfaction.

Sur appel de la SAS, la Cour d'appel de Paris, par son arrêt du 4 juillet 2013, retient que la convention d'assistance, de management et de gestion est sans cause et en prononce la nullité. Elle estime en effet que les missions faisant l'objet de la convention en question constituent une délégation, au moins pour partie, des fonctions de décision, de gestion et de représentation confiées à M. Z..

Quelles conséquences pratiques faut-il tirer de cette jurisprudence ?

La première conséquence est évidente : une convention d'assistance doit avoir pour objet des prestations de services distinctes des mandats ou missions confiées aux dirigeants sociaux, étant observé que le fait de prévoir des prestations de services ayant un champ plus large que celui des mandats ou missions n'est pas vraiment de nature à sauver la convention.

La deuxième conséquence n'est pas moins logique : si la convention d'assistance prévoit une mise à disposition d'une ou plusieurs personnes physiques, il faut que celles-ci non seulement n'exercent aucun mandat social mais en outre ne soient pas liées par un contrat de travail à la société bénéficiaire de la convention d'assistance.

L'essentiel, encore une fois, est d'éviter le double emploi.

Cette jurisprudence paraît valable quelle que soit la forme juridique de la société bénéficiaire de la convention d'assistance : société à responsabilité limitée, société anonyme, société par actions simplifiée (SAS), etc...

Cette jurisprudence est également applicable même si le dirigeant social n'est ni associé, ni dirigeant de la société de prestations de services.

En revanche, si la société prestataire fait des prestations qui n'entrent pas dans les mandats ou missions des dirigeants sociaux, il n'y a évidemment aucune difficulté.

Enfin, il est toujours possible de confier la présidence d'une SAS à une société assurant toutes les fonctions habituelles d'un dirigeant social. On n'est plus alors en présence d'une convention d'assistance mais d'un mandat social conféré à une personne morale.

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